Et Nietzsche a pleuré est un roman, où comme à son habitude, Irvin Yalom (La méthode Schopenhauer, Le problème Spinoza, …) met en scène un dialogue avec un philosophe, prétexte à découvrir une pensée philosophique dans un cadre structuré par l’approche d’Irvin Yalom de quatre grandes questions existentielles.
Ainsi, le roman se dévore et instruit en même temps, poussant la réflexion, et donnant tout d’un coup envie de s’attaquer au Gai savoir ou à Ainsi parlait Zarathoustra.
En attendant, voici quatre idées avec quelques renvois vers d’autres lectures plus ou moins récentes. Ces quatre idées sont celles qui m’ont le plus marqué (sans doute car ce sont elles qui rejoignent le plus nos activités chez JBM Management ?)… Peut-être vous donneront-elles envie de découvrir cet auteur ?
Toute relation humaine est une relation de pouvoir
Voici un postulat qu’aucun bon négociateur ou sociologue ne saurait démentir ! Si dans le roman Nietzsche semble poser le pouvoir comme un attribut de la personne, reposant en partie sur l’idée de dette (en donnant, j’oblige l’autre) on complèterait maintenant en liant le pouvoir à l’existence d’alternatives. A ce sujet lire par exemple Getting to Yes pour les négos, ou L’acteur et le système pour la socio
De chaque obligation morale, on peut faire deux lectures
Toujours de Nietzsche vient le concept d’inversion des valeurs : si je considère une obligation morale, c’est-à-dire une valeur partagée dans la société m’engageant à agir, comme par exemple la générosité, je peux soit voir sa pratique, et c’est le plus souvent le cas, comme une vertu, soit l’interroger en termes de pouvoir (ben oui, cf ci-dessus ! 😊). J’y vois alors une obligation du plus puissant de donner au plus faible, le puissant en apparence, devant donner, devient donc le véritable faible car « obligé » et réciproquement. Inversion des valeurs on vous dit !
L’éternel recommencement
Voici une idée qu’il faut « laisser faire son chemin ». Vous voici en train de lire un article sur LinkedIn. Ou de faire n’importe quoi d’autre d’ailleurs. Imaginez que cet instant se reproduise éternellement, et que vous le reviviez en permanence. Que feriez-vous ? Le changeriez-vous ? Le maintiendriez-vous ? La moindre de vos attitudes se charge alors de sens, et de gravité (tiens, si vous en voulez encore, allez par exemple voir l’insoutenable légèreté de l’être). Tout devient prétexte à choix ; mais attention tout choisir ne veut pas dire tout changer car dans tout choix binaire il y a trois options : choisir de changer, choisir de ne pas changer, ne pas choisir.
Derrière nos obsessions, quatre questions existentielles
Les paroles sont prêtées à Nietzsche, mais ne tromperont pas le lecteur de Yalom, qui retrouvera en filigrane dans tout le roman les quatre questions existentielles qui focalisent les réflexions de l’auteur :
- Finitude : si je sais la mort venir, comment ma vie en est-elle modifiée ?
- Sens : à quoi bon, par exemple, faire carrière puisque la mort est inéluctable ?
- Choix : de quoi, dans mes choix, suis-je responsable ?
- Solitude : je ne pourrais jamais partager entièrement mon vécu intérieur, et ne serai jamais réellement en contact avec autre chose qu’avec mes images du monde.
Bonnes lectures !